Une soirée estivale typique de juin – mon collègue et moi décidons de sortir à un 5 à 7 trop longtemps repoussé dans l’un des restaurants effervescents et une pointe artsy de Griffintown. En marchant le long de Notre-Dame, je suggère Grinder. Il est d’accord. Mais pas l’hôtesse à l’accueil.
Une réservation ? « Je n’en ai pas, mais nous sommes seulement deux… Pensez-vous pouvoir nous dégoter une petite place sur la terrasse ? » dis-je, en pointant du doigt l’espace convoité. Elle grimace aussitôt. « Surtout pas la terrasse. Ça va jusqu’à 10h ce soir. »
Déçus, nous nous éloignons, guidés cependant par nos sens qui nous attirent vers une petite foule inhabituelle et la fragrance incomparable du BBQ, qui envahit agréablement la rue soudainement. Que se passe-t-il par-là ? La Boucherie Grinder célèbre son ouverture !
Nous nous approchons de la table tant bien que mal, nous faufilant à travers une marée de jeunes professionnels qui rient, boivent et savourent la viande. La serveuse nous invite à goûter les grillades tout droit sorties du barbecue, en recommandant particulièrement le filet mignon, et nous demande si nous voulons du vin rouge ou blanc. Rouge s’il vous plaît !
Saisissant mon portefeuille, je m’informe alors de combien nous lui devons pour les consommations. C’est la maison qui paie, nous répond-elle en souriant. Je lui laisse tout de même un pourboire proportionnel au coût du vin. À en juger par le bol qui déborde à ras bord, tout le monde a également eu le même réflexe.
Nous buvons, nous mangeons, et découvrons un design intérieur magnifique, avec de majestueuses pièces de viande âgées à point suspendues, aguichantes à travers la paroi de verre qui nous en séparent. Nous nous faisons prendre en photo, et dégustons un délicieux bourbon au sirop d’érable vieilli en chêne, gracieuseté de la Distillerie 1769.
La vie est belle.
Nous avions complètement oublié qu’à peine quelques minutes plus tôt, ils n’étaient pas en mesure de nous accommoder. Nous nous sommes fait la promesse de revenir bientôt. Grinder a compris un élément crucial du marketing. Ils ont créé une expérience pour les passants et leur ont offert de la valeur, ne s’attendant à rien d’autre en retour que leur satisfaction. Pas de concours, pas de mots-clics, pas de demande d’aimer la page Facebook. Mais alors, ils sont tout de même arrivés à gagner notre affection cette soirée-là…
Je suis allée visiter leur page Facebook plus tard dans la nuit. Eh bien. Je leur avais déjà donné un like auparavant. Je l’avais oublié.
Mais je n’oublierai définitivement pas cette soirée, par contre.